mercredi 2 décembre 2015

Un sale climat..

Un sentiment.
Un sentiment de peur très récent.

Non pas que la menace terroriste me semble soudainement plus crédible ou plus justifiée. Non, je pense toujours que c'est un devoir moral de ne pas céder à la peur lorsque certains agitent une vilaine marionnette devant nos yeux.

Ce n'est pas non plus parce que l'Humanité accélère (c'est le principe d'une croissance exponentielle) jour après jour sa chute vers son propre déclin. Pas que ça m'enchante mais pour vivre dans notre monde absurde il faut un peu blinder sa carapace, une jolie façon de ne pas dire "se blaser".

Ce qui me fait peur est bien plus immédiat, bien plus palpable.

Le mois qui vient de passer s'est vu marqué par deux événements marquants à Paris : les attentats et la tenue de la COP21. Deux sujets sans rapport à première vue (quoique... [1][2][3]).



Les liens commencent à devenir plus évidents lorsque le niveau d'alerte national interdit la grande marche citoyenne organisée depuis des mois en marge de la grande conférence. D'abord à Paris (disons qu'on pourrait comprendre), puis à Bruxelles (moins) et enfin à Oostende (alors là..).



Des incohérences à tous les niveaux


A ce stade-ci, il m'est déjà difficile de comprendre en quoi un état d'urgence règle le problème du terrorisme, tout au mieux reporte t'il une de ses conséquences [1][2] mais il ne s'attaque en aucun cas à ses causes [1][2][3][4][5]. Le gouvernement belge s'est d'ailleurs merveilleusement bien distingué en terme de communication à cette occasion [1][2]. Le Bruxellois s'est ainsi momentanément retrouvé dans une capitale anesthésiée (pas de métro, écoles fermées, etc..). Le lendemain, comme par magie après l'arrestation d'une seule personne (et 17 relâchées sur 21 interpellées), les métros circulaient de nouveau jusqu'à 22h et les écoles ré-ouvraient.

Bref, passons, j'imagine que quand on est décideur on préfère se voir reprocher d'avoir fait un peu trop de zèle si rien n'arrive que de n'avoir rien fait si le pire venait à se produire.



Là où je sens qu'on me prend franchement pour une truffe c'est quand je vois que ni à Paris, ni à Bruxelles les marchés de Noël ne sont impactés au motif (que je partage) que la responsabilité des élus "est aussi de veiller à ce que la vie reprenne" (Philippe Close, échevin du tourisme).
Franchement. Les attaques sur Paris visaient elles les ONG environnementales ou le Bataclan, le stade de France et une série de lieux symboliques de la vie occidentale? Pourquoi un terroriste s'en prendrait il en priorité à des manifestants convaincus de l'urgence d'arrêter l'extractivisme plutôt qu'à un symbole de frénésie consommatrice?!



Pendant que militants et sympathisants redoublaient d'ingéniosité pour contourner tout ces obstacles (quelques exemples : en Belgique [1][2][3][4], à Paris [5][6][7] et un peu partout [8][9][10][11][12]). Nos dirigeants sont tout de même arrivés à transformer ce qui aurait dû être un énorme mouvement citoyen (les attentes tournaient autour de 100000 personnes pour Paris, 10000 pour Bruxelles) en une pléthore d'actions décentralisées. N'en déplaise à Avaaz, je ne peux m'empêcher de considérer que la devise "Divide et impera" a été appliquée à merveille même si je faisais -bien entendu- partie des 4000 participants à la chaîne pour le climat ce dimanche. J'en profite pour féliciter et remercier tous les collectifs qui font usage de ce devoir nécessaire qu'est la désobéissance civile avec beaucoup d'humour et de créativité depuis quelques jours [1a][1b][2][3][4][5].


Malheureusement, la farce continue et prend une nouvelle dimension lorsque la Belgique devient la risée du monde grâce à l'incompétence de nos dirigeants. La bonne nouvelle c'est qu'on a gagné un titre, la mauvaise c'est que c'est le titre de fossile du jour


Pourquoi j'ai peur?


Pendant ce temps, la population est bercée de douces promesses (mon père se réjouissait à l'instant au téléphone en me parlant des fonds massivement investis dans l'environnement et des opportunités de carrière que cela va certainement m'offrir) que vont nous offrir cette belle bande de cyniques, soutenus qu'il sont par des coupables de tout poils[1][2][3][4][5][6][7] (et accessoirement les votes qui nourrissent leur mandat)... Pendant qu'ils font semblant de parlementer, semblant d'écouter, les mandats de négociation [de 32:24 à 39:12] ont déjà été délimités depuis de longues semaines.



Je commençais ce billet en évoquant un sentiment de peur or jusqu'ici le lecteur attentif aura remarqué que je n'exprime que de l'indignation et de la colère

Je commence en effet à craindre ce climat sécuritaire et la dérive anti-démocratique qu'il entraîne. Pour mieux comprendre je vous suggère la lecture de cet article que je me permets de citer ici :

"(...) ce dont nous avons besoin, c'est d'améliorer l'efficacité de nos services de renseignement, ce qui ne se fait pas la précipitation et sous le coup de l'émotion; de nous souvenir que notre meilleure protection contre le terrorisme est l'ensemble de libertés et de droits qui rendent nos sociétés flexibles, adaptables, et qui font que notre mode de vie fait rêver infiniment plus de gens qu'il ne crée d'adversaires"

Nos sociétés doivent donc impérativement continuer à proposer les mêmes libertés. Et si j'ai peur aujourd'hui c'est parce que doucement, mais sûrement, nous sommes en train de les perdre. Du moins en France et dans une certaine mesure chez nous aussi.

Peut-être pensez vous que j'exagère? 
Prenez donc une grande bouffée d'air et suivons ensemble le lapin blanc dans son terrier..

Ça a commencé par les marches interdites (comme expliqué en début de ce texte), le président de la République qui souhaite modifier la constitution dans l'urgence (même le sacro-saint pacte de stabilité ne fait pas le poids face au pacte de sécurité! [1][2]), la Belgique s'aligne, un militant de la Coalition climat assigné à résidence [1][2][3][4][5], ils sont désormais 24 militants écologistes dans le même cas.
Ce témoignage des violences qui ont eu lieu ce dimanche à Paris nous permet de mieux comprendre ce qui s'y est passé et on constate encore une fois une dérive policière [1], bras armé d'un gouvernement qui sombre dans le sécuritaire contre tout bon sens (et je ne parle ici que des débordements en rapport avec la COP21 [1][2], il y a tout le reste!). Tout ceci dans un intervalle temporel extrêmement court.. (et durant ce temps aux USA... et dans le reste du monde).



Quand je vois tout ça, je ne peux pas m'empêcher de me dire qu'on est bien loin du compte que ça soit en matière de préservation du climat, de libertés individuelles ou de lutte contre le terrorisme.. et pour la première fois depuis le début des événements.. j'ai sincèrement peur. Peur de cette dérive d'une part [1] et des répercussions indirectes qu'elle appelle...



Malgré tout, je continue à vouloir y croire


Tout comme Thatcher a réussi à marteler un mensonge avec sa fameuse "There is no alternative", je continuerai à me l'approprier et à l'affirmer : Il n'y a pas d'alternative : nous devons dès aujourd'hui préparer notre avenir en commençant par apprendre à vivre ensemble, entre nous et avec les autres formes de vies sur Terre. Toute autre forme de supposé "réalisme" (en ce compris le discours de l'austérité ou de la croissance infinie) n'est en fait qu'une utopie maquillée. En tant qu'espèce supposée intelligente, isolée sur une petite planète dans un énorme Univers, il en va de notre survie.

N'hésitons pas à nous informer, à ouvrir nos niveaux de conscience du monde qui nous entoure, à exprimer et affiner nos opinions, à remettre en question nos certitudes, nos préjugés et nos modes de vie. Des personnes autour de nous mènent ces combats depuis des décennies et ont permis d'acquérir quelques victoires mais plus que jamais nous avons besoin de les soutenir, de les rejoindre et d'enfin devenir acteurs de ce changement auquel nous aspirons !





« La force qui m’anime vient d’une certitude. Je sens présente en moi l’humanité dont je fais partie. Non seulement je suis une petite partie dans le tout, mais le tout est à l’intérieur de moi-même. C’est peut-être cela qui me donne l’énergie de continuer sur la voie qui est la mienne. Et à un moment donné, sans que vous ne sachiez pourquoi, c’est comme une catalyse, quelque chose se passe, se transforme, bascule… C’est cela, l’espoir. » Edgar Morin



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